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Le salon 1973 présente une nouvelle gamme Porsche qui fait plutôt figure de révolution que d’évolution pour les amateurs de la marque. Troisième changement de cylindrée, deuxième changement d’appellation des modèles, mais surtout premier changement de look important. Sur le plan esthétique, le néophyte n’y verrait sans doute que des modifications de détails, mais pour les porschistes celles-ci sont profondes. A commencer par les nouveaux pare-chocs. Porsche a été dans l’obligation de les modifier pour se conformer à la nouvelle législation américaine qui exige des parechocs à absorption d’énergie. Pour satisfaire à cette exigence, Porsche décide d’utiliser un système de recul des pare-chocs comprenant des tubes d’acier télescopiques pour l’Europe et des vérins hydrauliques pour les USA. Ces mécanismes sont cachés par des soufflets noirs. Les pare-chocs sont censés pouvoir encaisser des impacts allant jusqu’à 8 km/h sans broncher. La nouvelle ligne est critiquée, comme à chaque changement de look apporté par Porsche à la 911, serait-on tenté de dire. A l’époque, on dit la 911 défigurée par ces soufflets qui perdureront pourtant jusqu’en 1989 et l’arrivée de la 964. Aujourd’hui, qui critiquerait cette ligne? Pour intégrer les nouveaux pare-chocs, le capot est allongé et devient plus plat à son extrémité. Le spoiler frontal se fait beaucoup plus discret. Les ailes aussi sont modifiées. Les feux de position et les clignotants sont intégrés au pare-chocs. A l’arrière, la plaque est encadrée et éclairée par deux butoirs et une bande rouge apparaît entre les feux. 41 ans après, elle fait encore fantasmer les porschistes ! Elle porte l’inscription «Porsche» et il ne reste donc sur le capot arrière que le sigle du modèle («911», «911 S» ou «Carrera») avec un 2.7 sur la grille (ce dernier disparaît d’ailleurs pour le millésime 75). La nouvelle gamme est présentée l’année du premier choc pétrolier. Une crise mondiale qui va provoquer un véritable repli de l’automobile sportive. Porsche a souvent anticipé les problèmes et c’est encore le cas cette fois puisque dès 1973, la 911 2.4 T américaine reçoit l’injection K-Jetronic en remplacement des injections mécaniques plus gourmandes. Cette injection est adoptée sur les 911 et 911 S, sachant que la Carrera, elle, garde l’injection mécanique de la 2.7 RS. 911, 911 S et Carrera ? Oui, toute la gamme est modifiée puisque la S n’en est plus le sommet. L’entrée est la 911 tout court et c’est la Carrera qui, en reprenant l’intégralité de la mécanique de la RS, en devient le nouveau chef de file. De gros changements se voient aussi à l’intérieur. Des nouveaux sièges arrivent. Plus enveloppants, avec appuie-tête intégré et des réglages de l’assise plus aisés. Il y a par ailleurs une foultitude de différences, à l’image du volant trois branches aussi utilisé sur la Turbo et la 3.0 RS, ou encore du petit disque central supportant les aiguilles des instruments, qui est maintenant noir. De petites améliorations sont introduites pour le millésime 75 : meilleure isolation phonique, ventilateur électrique additionnel et alternateur plus puissant, et cylindres moteur passant du Nikasil à l’alusil pour une meilleure diffusion de la chaleur. Pour le dernier millésime avant une nouvelle augmentation de la cylindrée, la 911 passe à 165 ch
Au moment de mettre le contact, on trouvera sans doute que les 2.7 à injection électronique sonnent moins bien que les 2.4 à injection mécanique. Mais on pourra aussi trouver la sonorité plus pure, plus mélodieuse que celle d’une SC ou d’une 3.2. Ces réflexions ne valent pas pour la Carrera. Là, c’est le moteur et le même châssis (à quelques kilos et détails près) que la 2.7 RS. La sonorité de la Carrera vous saute donc tout de suite aux oreilles. C’est bien celle de la RS, en à peine plus soft. Malgré l’insonorisation plus efficace, cette sonorité est bien vivante dans l’habitacle. A bord, le maintien des sièges et la position de conduite apparaissent vite comme étant hors d’âge. Ils ont certes été améliorés par rapport aux versions précédentes, mais on n’est quand même pas dans une 991 ! Ce n’est d’ailleurs pas le but recherché. Les performances sont loin de la génération actuelle, et c’est tout à fait normal. Le principe ici est de retrouver le plaisir de cette famille de 911 longtemps délaissée car trop coincée entre les premières générations d’un côté et les SC/3.2 de l’autre. Le 2.7, sans être un foudre de guerre en version 150 ch, offre une bonne santé quand même. Si vous en voulez plus, c’est bien entendu la Carrera qu’il faut viser. Avec elle on retrouve un plaisir de pilotage que les Porsche modernes, aussi abouties soient-elles, ont oublié. Résumonsle par les mots légèreté, vivacité, musique et comportement joueur. En attaquant fort avec une Carrera, on retrouve en effet peu ou prou les mêmes sensations qu’avec une RS. C’est dire. En prenant le volant de la 911 S, on se rend compte que la boîte 915 est très bien adaptée à cette génération. Le pilotage de ces voitures est un peu entre celui d’une 2.4 S et d’une SC, mais probablement plus proche de la première. Il s’agit encore d’un comportement à l’ancienne. Il faut donc savoir être précis dans les ordres que l’on transmet à l’auto par le biais du volant et des pédales. Disons le haut et fort, on peut s’amuser avec ces autos. Le plaisir est bien là. C’est celui d’un pilotage léger, finalement assez précis, et très proche des origines même de la 911. Un plaisir sublimé, vous l’aurez compris, avec la Carrera. Elle est légère, freine très bien, et se place au millimètre. Oh pas comme une moderne, qui est une voiture naturellement précise. Une 2.7 Carrera peut l’être tout autant, mais elle ne l’est pas naturellement. Là ce sont vos gestes qui devront être précis. Avec elle, on se retrouve en permanence sur un fil. On joue avec tout. L’accélérateur, le volant, le levier de vitesses. Si on n’en fait pas assez, elle sera imprécise. Si on en est fait trop, elle vous le fera immédiatement sentir. Passionnant !
La 2.7 n’est pas la 911 la plus courante. Non pas qu’elle ait été particulièrement peu produite, encore que, mais plutôt parce qu’elle a longtemps été particulièrement peu appréciée ! Les valeurs des 2.7 ont souvent été très peu élevées. Du coup, elles étaient achetées par des gens qui connaissaient mal les Porsche, et n’en prenaient pas particulièrement soin. De fait, bon nombre de 2.7 ont disparu par manque d’amour et d’entretien. C’est très vrai pour les versions de base. Prenez la 911 150 ch. Combien d’exemplaires, sur les 9320 produits en deux ans, ont fini à la casse, cannibalisés ou modifiés ? Voilà qui laisse peu de chance d’en trouver une en état d’origine aujourd’hui. Surtout qu’on peut, au risque de choquer, raisonnablement poser la question de pourquoi acheter une 150 ch. Peut-être parce qu’il s’agit d’une des 911 classics les moins chères du marché et que sa valeur devrait continuer à monter comme les autres anciennes. Attention tout de même. La question choquera les amoureux de cette voiture, mais elle est légitime. Pour la même somme, pourquoi ne pas viser une SC globalement plus sûre et plus fiable? Sans vouloir dicter le choix de chacun, disons simplement que si le choix se porte sur une 2.7, il faudra en viser une aussi proche de l’origine que possible car c’est là que se nichera sa vraie valeur sur le marché actuel de la collection. Qu’en est-il de la fiabilité de la 2.7 ? C’est une ancienne, donc elle peut souffrir de la rouille. A ce sujet, rappelons que la 911 165 ch présentée pour le millésime 1976 était galvanisée, ce qui change tout ! La Carrera 2.7 disparaissait alors au profit de la 3.0, mais une petite série de 133 exemplaires a quand même été produite sur le millésime 76. Ces voitures ont donc aussi bénéficié de la galvanisation. Niveau moteur, ils se fragilisent à la longue. La faute au tristement célèbre carter en magnésium qui a tendance à devenir poreux et peut finir par casser. Attention aux frais de réparation ou de réfection ! Sur la Carrera, les pompes d’injection peuvent aussi poser problème. Sur ces moteurs, plus encore peut-être qu’ailleurs, il s’agit de ne pas tirer dedans à froid si on souhaite le conserver longtemps. Au final, le problème de la 2.7, c’est justement la 2.7 elle-même ! Comprenez par là que ce modèle n’ayant pas su trouver rapidement sa place sur le marché de la collection, sa cote pas très élevée a longtemps créé un déséquilibre entre ce que pourrait coûter une restauration et la valeur de l’auto une fois restaurée. Puis d’un coup, la spéculation générale sur le marché des anciennes a aussi rattrapé la génération 2.7. La Carrera a flambé parce que les acheteurs se sont finalement rappelés qu’il s’agit grosso modo d’une 2.7 RS. Voilà donc une voiture rare, souvent mal comprise, mais qui régale aujourd’hui ceux qui ont su, avant les autres, reconnaître ses indéniables qualités
La 2.7 souffre de l’une des plus mauvaises réputations de l’histoire de la 911. La faute au carter moteur en magnésium bien sûr, qui devient poreux avec le temps, tout comme les goujons qui le relient au haut moteur. Le mieux est de le remplacer par un carter en alu qui éliminera tout problème de fiabilité. Mais là intervient un autre souci, celui de la valeur globale d’une 2.7, parfois trop faible pour justifier, aux yeux de certains, le coût d’une telle intervention
La 911 2.7 165 ch, commercialisée pour le millésime 1976, inaugure ce procédé permettant d’appliquer du zinc par trempage à chaud sur les deux faces de la tôle. La caisse, mais aussi toutes les pièces de carrosserie sont concernées. La garantie anti-corrosion est ainsi portée à 6 ans et le marché de la 911 d’occasion change à jamais, la rouille étant un problème nettement moins sérieux
Pour le millésime 75, Porsche a proposé la première série spéciale de ce type, pour fêter les 25 ans de la production de voitures de sport par la marque (celle-ci avait démarré en 1949, la série Jubilé a donc été lancée en 1974, pour le millésime 75). Les Jubilé étaient gris argent métallisé avec une plaque «25 jahre in seiner shönsten form» (en grande forme depuis 25 ans) au tableau de bord et toute une série d’options regroupées sous le code M246. Les Jubilé ont été proposées en coupé et Targa sur la 911 et la S
Le panneau de toit est d’un seul tenant (il était auparavant pliable) sauf… en cas de climatisation. Là il fallait faire avec le toit pliable car l’autre ne rentrait pas dans le coffre
Cette option, appelée Tempostat chez Porsche, est arrivée avec le millésime 1976 pour l’ensemble de la gamme 911
Avec le millésime 76 le rétroviseur extérieur devient plus gros et bénéficie de la possibilité de réglages électriques et d’un système chauffant